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    J’ai passé mon week-end de la Toussaint à Maastricht. Jadis, avant le traité, à part quelques amateurs d’histoire qui savaient que D’Artagnan y laissa sa peau, rares étaient vos compatriotes au courant de l’existence de cette ville. D’ailleurs, certains employés de la SNCF éprouvent encore aujourd’hui beaucoup de peine pour la situer sur la carte européenne. Ecrire et prononcer son nom correctement ne semble pas une mince affaire non plus. Soit !, la ville est charmante, riche de plusieurs remparts (dont certains joliment plantés de plantes aromatiques), une imposante quantité d’églises de toutes les époques (y compris une collection ahurissante de reliquaires) et un véritable labyrinthe de ruelles et grandes places où l’on fréquente les boutiques et la bourgeoisie chics de la ville. La ville possède même un musée avec quelque Breughel (n’omettez pas la foire TEFAF si vous souhaitez vous en offrir un) si vous êtes un snob du genre artistique ou culturel. Vous pouvez également y participer annuellement au Carnaval, mais n’oubliez pas : vous êtes à dix mille lieux de Venise. La fête se passe surtout dans des brasseries, car il n’y a pas de palais digne de ce nom au bord de la Meuse.  Ici, la seule noblesse qui participe aux parades et aux réceptions est un roturier du cru élu par le comité des festivités et qui reçoit le titre de « Prince » pour la durée de la saison. Une femme avertie en vaut deux !

    Par ailleurs, évitez également l’Hôtel de l’Empereur qui a perdu au moins deux de ses quatre étoiles. Comme quoi, il faut toujours se méfier, même des hôtels aux noms pourtant très prometteurs. Je n’y logerai même pas un hobereau hongrois. Aux âmes sensibles nous signalons également que la ville est parsemée d’effigies, de bustes et de statues d’André Rieu, qui est originaire de cette ville, et dont les interprétations musicales adaptées au « grand public »  et souvent jugées d'un style pompier, risquent de faire fuir les snobs conservateurs et puristes. Réfugiez-vous alors dans un de ces ravissants petits manoirs dans la campagne limbourgeoise, où autrefois une aristocratie aussi abondante qu’insolite (de Charlemagne à Guillaume III des Pays-Bas, sans négliger l’encombrement sensationnel de comtes, ducs, marquis, barons et leurs épouses : dans cette partie des Pays-Bas, un village pourvu de trois, quatre ou cinq châteaux n’est pas une curiosité), chassait le cerf. Au demeurant, Saint-Lambert, accessoirement un évêque issu d’une famille aristocratique, éduqué à la cour royale mérovingienne, un des conseillers les plus écoutés de plusieurs rois austrasiens et prédécesseur du patron de tous les chasseurs, Saint-Hubert, était également originaire de cette ville. Il sera assassiné par un domesticus (une sorte de Premier Ministre) un peu trop zélé (fléau dont souffrent beaucoup de domestiques) de Pépin le Gros, puisque l’évêque désapprouva la naissance d’un bâtard de ce dernier. Il paraît que le saint homme se vengea à son tour et frappa ses assassins de maladies horribles.

    Soyez donc sages, surtout si votre budget « personnel » a déjà sérieusement souffert de la crise, et consultez d’abord le calendrier sur le site de l’artiste afin de vous assurer qu’il soit bien en tournée à Mexico City ou à Melbourne, pour ne pas être tenté de faire cette besogne soi-même. Certes, dans les oreilles d’un hypocondre snob voué à de très exclusives maladies, à des cas très rares et loin des maux des communs, un malaise suite à une malédiction prononcée par un martyr médiéval sonne sûrement comme le nec plus ultra des maladies snobs et doit égaler une fracture réduite par le plus illustre des professeurs ou, éventuellement, par son « bras droit ». Or parfois le nombre de bras droits d’un thérapeute dépasse beaucoup le nombre habituel, mais, pardi ! on connaît le même embarras dans le dépôt des reliques du Vatican : ainsi, certains saints ont vingt-trois doigts, trois crânes ou cinq jambes, afin de satisfaire le "grand public"... ! Prions pour nos frères les snobs puristes qu’André Rieu n’en aura pas autant ! 

    Singulièrement vôtre,

    anton@snoblissime.com

     

     


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    Hier soir, lors d’un dîner succulent dans un salon particulier du Macéo (15, rue des Petits Champs – 75001 Paris) en honneur de notre exquise consultante en nutrition anti-âge Mildred (en présence d’une élite internationale, délicieusement lascive, prodigue et éloquente d’agréments opulents et spirituels ; en bref ultra-snob), notre ami John-John eut une idée fabuleuse : pourquoi Liliane Bettencourt ne fait-elle pas une donation de sa fortune au Trésor Public français ?

    Les arguments de John-John étaient de poids ! Premièrement, il n’y aura plus ce « trou » immense dans la caisse de votre Sécurité Sociale : donc fini les grèves et la pénurie de carburants. Deuxièmement : Madame Bettencourt ne sera plus harcelée par sa fille et son avocat. Troisièmement : l’image de marque de la Maison L’Oréal, qui a atrocement souffert de cette affaire, sera blanchie. Ce serait, en effet, un coup de marketing prodigieux, sans la dépouiller entièrement: il lui restera toujours sa villa somptueuse à Neuilly-sur-Seine, son île et ses nombreux comptes bancaires en Suisse ou en Asie.

    Se pose alors la question: est-elle snob, la charité ?

    Lord Henry, dans Le Portrait de Dorian Gray, considère le dynamisme de sa tante Lady Agatha, qui secoure un quartier pauvre de Londres, comme « trop laid, trop horrible, trop déprimant ».  Wilde parle même d’ « immoralité révoltante ». Charles Baudelaire se moque également de ces « entrepreneurs de bonheur public » qui persuadent les miséreux « qu’ils sont tous des rois détrônés ». L’auteur du Spleen de Paris suggère plutôt qu’on « assomme » les pauvres afin qu’ils redécouvrent leur orgueil. Ce qui n’est pas surprenant car si le dandy revendique une chose, c’est bien sa fatuité et son amour-propre! Ainsi le dandy s’amuse à provoquer nos codes moraux et à déstabiliser notre conscience. Ce qui explique sans doute pourquoi certains auteurs pensent que François-Marie Banier serait un dandy... Or, selon Françoise Dolto, qui est cependant une notoriété considérable, le public a la fâcheuse tendance de confondre « le dandy et ses imitateurs ratés, ces jeunes gens bien vêtus, peu occupés qui, par leurs familles ou par quelque ami cher, sont entretenus à rester parasites sémillants d’une société dite de plaisir ». Et toc ! 

    En revanche, chaque élan caritatif (et chaque donation) pourrait être tenu pour une forme altruiste de domination, de supériorité, de vanité et de snobisme.  Donner aux pauvres est flatteur pour l’ego ! Qui donne aux pauvres, prête à Dieu. Considérant son âge avancé, Madame Bettencourt (qui, au demeurant, ne figure pas sur la liste de clients pourtant ultra-élective de notre amie Mildred) devait y songer sérieusement. De par ailleurs, parfois, lorsqu’on s’engage véritablement, on devient une sorte de divinité soi-même ! Certes, l’Histoire religieuse mentionne déjà une Sainte Liliane (sauvagement martyrisée par un émir arabe au 9ème siècle), mais qui s’en souvient encore ? Notons toutefois que l’Ordre de la Charité (voir image), strictement réservé aux dames nobles (et richement orné de rubis et de diamants) fut instauré en 1878, par Abdülhamid II, sultan de l’empire Ottoman.  

    Indéniablement, la charité a toujours été un des passe-temps favoris de l’élite. Je vous rappelle cette anecdote touchante d’une autre lady débordante d’énergie comme seules les vieilles Anglaises savent l’être, à son retour à la capitale après quelques semaines de repos dans sa campagne. Dès le lendemain matin, elle souhaite se rendre près de ses protégés. Mais au lieu d’y trouver l’ambiance habituelle « hiver 54 », elle découvre un immense chantier, avec plein de HLM en construction. « Mon Dieu ! », crie-t-elle, saisie, à son chauffeur en sortant de sa Rolls Royce, « Qu’a-t-on fait avec mon adorable quartier de misère ?! »

    A propos, la lady, tout comme Madonna arrivant en 4 X 4 à l’orphelinat au Mali, commit un horrible faux-pas ! Car que disent les guides des convenances ? « Naturellement, il faut s’habiller discrètement pour visiter les pauvres. Prenons garde cependant qu’ils peuvent se sentir flattés qu’on soit bien mis quand on vient vers eux. Pas d’autos luxueuses à la porte d’une maison d’indigents; prenons le tramway, l’autobus, le métro. »

    Ces règles du savoir-vivre doivent en refroidir plus d’un (pourtant, une Madonna sur le dos d’un âne, quoi de plus harmonieux ?). Pour info : le Trésor Public de Neuilly-sur-Seine se trouve au 3, rue Boutard, métro Pont de Neuilly, ou le bus n° 176….

    Singulièrement vôtre,

    Anton@snoblissime.com

     


  • Mon Petit Bréviaire du Snobisme a déjà été traduit dans plusieurs langues exotiques (sans omettre une version piratée en Serbe !), mais pas encore en Afrikaans. Je sais, vous avez gardé un sentiment acrimonieux des prestations honteuses de vos footballeurs dans ce joli pays, malgré leur hôtel à cinq étoiles au bord de l'Océan Indien, nonobstant jugé « indécent » par votre secrétaire d’état… 

    La politique de l’apartheid appartient désormais à l’Histoire, et c’est une bonne chose. Quant au snobisme, il n’a jamais fait de discrimination entre les variétés de carnations qui peuplent ce monde. Ainsi la cérémonie du thé, le Théâtre Nô, l’ikebana ou la consommation de certains bordelais, sont toujours le privilège des nobles et riches Japonais. Le faste des certains maharadjas indiens restera sans doute un des plus flamboyants de notre Histoire. Par ailleurs, actuellement, en Inde (accessoirement le pays qui compte le plus de végétariens), ses citoyens prospères aspirent de plus en plus, par snobisme, à devenir des consommateurs insatiables de viande, y compris celle de vaches sacrées ! Et en Chine ou à Taiwan, on s’en doute, grâce à notre consommation fulgurante de produits asiatiques, le nombre de snobs ne cesse d’accroître quotidiennement.

    Il y a des gens de couleur dont l’amour-propre et le snobisme sont indéniables. Mohamed Ali, Whitney Houston, Prince, Barack et Michèle Obama, Noami Campbell, Malcolm X, Bokassa I, Michael Jackson ; des présumées princesses nubiennes (que l’on croise par douzaine à Paris) aux « sapeurs » de Brazzaville ou de Barbès : tous nous prouvent que le snobisme, qu’il soit « bling-bling » ou « bang-bang » (voire panafricaniste), n’est pas uniquement réservé au type caucasien.  Quelques aspirants expérimentent même (parfois pathétiquement) une carnation plus claire, bien que le snobisme de la peau blanche, naguère un symbole d’appartenance noble, ait disparu depuis plus d’un siècle. Pour votre gouverne : jetez un œil sur le blog de ma chère collègue américaine Danielle Belton (www.Blacksnob.com). 

    Au demeurant, selon certaines sources, les Sénégalais et les Mozambicains seraient plus snobs que les Ivoiriens ou les Camerounais. Je suppose que c’est comme chez nous, où les Suédois snobent les Finlandais, les Espagnols les Portugais, les Flamands les Wallons, et cetera.

    Et en Afrique du Sud ? Souvenez-vous de Winnie Mandela (et ses gardes du corps peu recommandables) et son ex-mari (et ses amis « stars » tels les Spice Girls, Amy Winehouse, Robert de Niro, Elton John, Cherie Blair et Uma Thurman) : tout nous laisse croire que le snobisme s’apprend très vite ! Si, d’aventure, vous y envisagez un séjour au calme (maintenant que les fanatiques du foot ont quitté les lieux), n’oubliez pas d’effectuer un petit voyage dans le luxueux Train Bleu (entre Johannesburg et le Cap) et, si vous êtes un snob culinaire, de déguster un bifteck de crocodile ou une poignée de chenilles grillées. Le snob à vin, après avoir fait quelques fouilles dans une mine de diamant (ou après avoir chassé une horde d’antilopes), se rafraîchira avec un verre d’un « Estate » (au sommet des appellations sud-africaines) en bavardant avec le chef d’une tribu hottentote ou en lisant le petit résumé en Afrikaans de mon Bréviaire ci-après (par la linguiste/écrivain Zandra Bezuidenhout), afin de ne pas passer pour un vulgaire touriste. 

    Singulièrement vôtre,

    anton@snoblissime.com


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    Je vous présente mes humbles excuses : j’aurais dû vous prévenir de mon absence. En effet, j’accompagnais une amie dont les parents possèdent un pavillon de chasse en Sologne lors de sa collecte de cèpes sur ces terres boisées ancestrales.  J’étais donc jusqu’aux chevilles dans la boue et les feuilles mortes, mais mes Fenestrier ont bien résisté. Pour combler les cèpes manquants, nous avons cueilli quelques pommes, poires et coings. Les champignons ont terminé sur des blini et les pommes ont eu une belle fin aussi (voir recette ci-après). Les autres fruits gisent, pour l’instant, dans des poteries antiques. Les poires finiront sans doute dans une salade à la Hussarde (voir rubrique « recettes »). Quant aux deux coings, je pense qu’ils achèveront leur séjour à la capitale en nature morte. On m’a dit, que ce fruit est pénible à éplucher, alors je n’essaie même pas.

    Nous avons également fait un petit saut à Menetou-Salon. Ou plutôt un grand saut, car il a fallu d’abord visiter plusieurs villages à la quête d’un établissement digne de nous recevoir. Ce n’est pas une mince affaire : se nourrir en province après 20h. C’était donc un peu sinistre, mais nous y avons toutefois découvert un rouge du cru très convenable, et le dîner (malgré la quantité insuffisante de foie gras) était plutôt bien aussi.

    Voilà pourquoi ! Maintenant je suis de nouveau  connecté au monde! Pour combien de temps ? Allons ! J’ai horreur des choses régulières et prévisibles, pas vous ? Laissons les abonnements aux bourgeois ! Vivons dangereusement ! Encore un luxe qui ne coûte pas forcément très cher ! Cela dit, par les temps qui courent, sans doute aussi un énième snobisme qui risque d’être annihilé par sa popularité ! Je répète : ce blog n’est pas un vulgaire périodique ! C’est un billet d’humeur. Et il y a des jours où l’humeur est défaillante, comme moi ces derniers jours.

    Soit ! Mon blog a eu sa 10.000ème visite ! En voilà une bonne nouvelle ! Cela mérite certes que vous buviez une ou deux Veuves à ma santé, cependant, ne le criez pas sur les toits (ni sur Facebook). M’inspirant de Montherlant , je vous rappelle qu’un blog, c’est comme parler à table, devant les domestiques . Espérons et prions donc que notre snob'log ne tombera pas entre des mains indésirables, ni dans un classement !

    Singulièrement vôtre, 

     

    anton@snoblissime.com

     


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    Que le temps passe vite ! Je viens de me rendre compte que cela fait maintenant exactement 35 ans que j’habite votre jolie république. Certes, il y a eu quelques fugues, car je suis un bohémien dans l’âme (et j’ajoute afin de ne pas être débusqué par Monsieur Hortefeux: uniquement dans l’âme !), mais j’ai toujours été content de revenir.

    Valéry Giscard d’Estaing était « mon » premier président. Avec un nom pareil (et son mariage dans la chapelle privée de la famille de Brantes), moi, habitué jusqu’à-là à vivre paisiblement dans une monarchie, je n’ai pas eu beaucoup de mal à m'accoutumer aux concepts et idéologies républicains. Ensuite, il y a eu François Mitterrand : un cousin au 32è degré de la reine Elisabeth II d’Angleterre, avec des airs et maintiens dédaigneux d’un empereur absolu. Puis Jacques Chirac et son épouse Bernadette Chodron de Courcel (et sa manie des œuvres charitables) : franchement, on aurait pu les confondre avec un couple de souverains belges.

    Et aujourd'hui, c’est Nicolas Sarkozy, qui, selon les rumeurs, est issu d’une famille de noblesse hongroise ! Pourtant, des aristocrates -et j’en fréquente quasiment tous les jours-  « bling-bling » sont une espèce plutôt rare. Autre petite ombre, c’est son épouse, née d’une liaison extraconjugale. Cela dit, des bâtards royaux, il y en a eu dans toutes les monarchies, voire profusément en France. Puis, même si votre First Lady n’a pas de sang bleu, elle s’avère toutefois fort ambitieuse: elle est indéniablement plus sensible au snob-appeal qu’à la séduction charnelle de son époux. Et ces photos où elle expose son corps dévêtu ? Évidemment, Paola de Belgique et Sophie de Grèce n’y songeraient même pas dans leurs rêves les plus audacieux, cependant je vous rappelle l’histoire de Lady Godiva, une noble dame anglaise qui, d'après la légende, a parcouru nue à cheval les rues et esplanades de la ville de Coventry au Moyen-Âge, afin de persuader son mari le comte de diminuer les impôts. Si Carla en ferait autant, sans doute vous seriez moins scandalisé !

    Et qui sera l’heureux occupant de l’Elysée en 2012? Dominique Marie François René Galouzeau de Villepin ?  Diantre ! Comment voulez-vous que j’apprenne vos valeurs républicaines alors que tout me fait croire que vous déplorez la monarchie !

    Singulièrement vôtre,

    Anton@Snoblissime.com

     

     


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    Me voilà de retour parmi vous, chères lectrices et chers lecteurs. J’avais tellement hâte de vous écrire, car figurez-vous, ce que j’ai découvert pendant mes lectures estivales dans « La première enquête de Maigret » en version « poche » (vintage bien sûr) m’a fortement agité : on tue par snobisme ! Et oui !  Dans cette enquête, la victime est un certain comte d’Anseval, connu sous le nom de « Bob », dont le château avait été acheté par une famille de nouveaux riches totalement dépourvue de généalogie palpitante. Simenon précise que les Anseval n’avaient pas été « chics » avec eux: ils avaient vendu le château et les fermes et s’étaient retirés discrètement. Un peu trop discrètement même, car ils n’avaient pas voulu – même pas juste une seule fois - recevoir les nouveaux châtelains à dîner, ou même à déjeuner. Malheureusement, on n’achète pas ses ancêtres. Alors, dans son testament, le grand-père de cette famille de parvenus avait mis des clauses très explicites dans son testament incitant sa petite fille à épouser un Anseval afin que la famille puisse remonter aux Croisés ! Par chance, celle-ci était mordue pour s’appeler comtesse d’Anseval. Mais, par malheur, c’est le comte qui n’en voulait pas….

    Bien entendu, je ne veux pas qu’un tel drame vous arrive ! Du coup, je me suis fait des soucis pour vous. Enormément de soucis ! Ca a presque gâché les plaisirs de mes vacances. J’espère toutefois que vous êtes toujours élégamment installé dans votre Bertoia ou bergère Louis XVI, appréciant les bienfaits d’un rooibos de Betjeman & Barton, au lieu d’être questionné par des policiers qui sentent le fauve, sur un tabouret sans marque dans une cellule un peu trop dépouillée à votre goût. Si toutefois vous avez besoin d’un témoin à décharge, je me tiens à votre disposition. En tant qu’expert en snobisme, je pourrais peut-être souffler au jury et aux juges que le snobisme soit une chose fort humaine, que l’humanité entière en souffre et que pour certains snobs, cela devient une véritable obsession, voire un traumatisme. Cela pourrait considérablement adoucir la sentence. Votre avocat en sait probablement bien plus que moi. Vous cherchez un avocat snob ? Mais voyons ! Tous les avocats en sont ! Et en prison ? Je n’ai là aucune expérience, mais mon collègue, le Duc de Bedford, nous signale qu’une hiérarchie très stricte est maintenue dans les prisons. Selon lui, les prisonniers aux incarcérations longues snobent ceux qui n’y séjournent que quelques semaines, les criminels professionnels snobent les amateurs et les voleurs d’occasion, et les armoires à glace snobent les faussaires de billets et les souteneurs.

    Grosso modo : vous pourriez toujours y exercer votre snobisme ! Merci, grand merci, cher collègue, vous m'avez soulagé d'un poids qui pesait très lourd sur ma conscience. Maintenant que je sais mes lectrices et lecteurs à l'abri, j’ai presque envie de retourner à mes villégiatures….

    Singulièrement vôtre,

    anton@snoblissime.com


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    Ca y est ! Je me mets en grève ! J’en suis tout excité car c’est la première fois dans ma vie ! Est-ce snob ? Bien sûr : la paresse et l’insoumission ont toujours été des apanages aristocratiques!

    À l’origine, « faire grève » ou « être en grève » était se tenir sur la place de l’actuel hôtel de ville de Paris, sur les grèves de la Seine, « en attendant de l’ouvrage ». Personnellement, à l’heure de cette concentration effroyable sur les berges de la Seine, de Parisiens et banlieusards ignorant l’existence de Deauville, nommée « Paris Plage », je vous le déconseille vigoureusement ! Or, vous pouvez aussi vous allonger élégamment sur un plaid Hermès sur les grèves de la Loire et y organiser un pique-nique ultra-mondain avec quelques bouteilles d’un Menetou-Salon du cru, et prétendre que vous « faites grève ».  Par ailleurs, il existe également une version « perlée »…

    Aujourd’hui, un mois après son lancement, mon blog a dépassé les 5.000 visiteurs et je vous en suis très reconnaissant. Tel un grand seigneur, je vous ai fourni gracieusement une quantité d’informations indispensables pour vous aider à maintenir votre standing pendant ces moments de crise. Vous ne pouvez pas en dire autant de Monsieur Rouvillois dont l’œuvre peu palpitante publiée par Flammarion est toujours vendue à prix fort dans les librairies. Parfois j’ai vraiment l’impression que la France soit un pays communiste où le savoir et la connaissance ne sont pas rémunérés… Vous trouvez ça normal? 

    A ce propos, je ne vous cache pas, que le volume des visiteurs russes m’a beaucoup surpris: ils sont probablement tous en train de me plagier… Certes, la plupart des Russes étaient privés de snobisme depuis des décennies. Selon un dictionnaire de langue russe datant de 1953, un snob était un « homme creux et d’un intellect restreint, il se passionne seulement pour le vernis extérieur et a tendance à imiter les goûts et les manières de la haute société bourgeoise et aristocratique».

    Notons toutefois qu’un ami de Poutine a récemment eu l’idée de lancer une chaîne de télévision appelée SNOB ! Selon lui, la définition du snob est « un homme d’affaires qui a réussi » ! L'ignare n’a sans doute jamais consulté la bible snob du Duc de Bedford qui soutient que le succès soit une chose absolument vulgaire! Le snobisme est donc de retour en Russie, et j’en suis content pour les Russes, même s’il me semble encore très « primaire ». Il y a même des Russes très nostalgiques qui rapprochent Poutine du tsar et de Dieu ! D’ailleurs, un commentateur politique du Kremlin souligne ses pouvoirs magiques de génie national, concluant que la citoyenneté russe deviendra bientôt « une lignée noble » et que « les Russes finiront tous des aristocrates ».  Je suis effectivement très fier d’y contribuer.

    Mais là, je suis en grève. Dans quelques instants je pars chez des amis dans une villa ayant appartenue aux Poniatowski et ensuite sur la plage d'une île frisonne, où j’ai de la famille. Ainsi, on ne peut pas me confondre avec un touriste ordinaire. Quand on est snob, il faut être prudent, même lorsqu'on est un snob gréviste... 

    Singulièrement vôtre,

    Anton@Snoblissime.com

     


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    Edito n° 3. Pour l’instant, je tiens le rythme. Mais je ne vous promets rien, avec ces atmosphères estivales, on a tendance à oublier. J’ai failli faire un saut dans la partie allemande du Limbourg (un des meilleurs pains d’épices du monde s’achète à Aix-la-Chapelle, les Aachener Printen), mais j’ai décidé de maîtriser ma gourmandise. J’ai même annulé mon séjour à Stuttgart, ville où le nombre de « Schickimickis » au km2 est certainement un des plus élevés de l’Allemagne. C’est ainsi que la langue allemande dénomme les gens chics et élégants qui passent leurs temps à courir (littéralement bien sûr, parce qu’ils ont tous des Porsche et des BMW) d’une soirée mondaine à une autre. Sachez qu’en Autriche, ces snobs sont baptisés des « Adabei », une déformation dialectique de « Auch Dabei », ce qui veut dire « aussi de la partie ». De la High Society natürlich!

    Mais je snobe l’Allemagne cette année. Vous le saviez sans doute déjà, mais il y a dix ans, au Salon du Livre de Francfort, mon éditeur allemand avait prévu du vin mousseux pour le lancement de mon guide intitulé Die Welt der Snobs (la version teutonne du Petit Bréviaire du Snobisme). Certes, c’est un peu de ma faute : j’aurais dû l’informer que les vins mousseux m’occasionnent des crampes incommodes dans mes doigts et mollets.  Mais, puisque j’avais consacré un chapitre entier au champagne, le message me semblait pourtant clair !  Incontestablement, il y avait de quoi faire un joli scandale, mais j’ai commandé très calmement une eau gazeuse. Nonobstant, dès le lendemain, ce fait-divers était dans toute la presse. Même Vogue (accompagné d’éloges pour mon œuvre et mon sang-froid) en informa ses lectrices. Un journaliste d’un quotidien ex-allemand de l’Est intitula son article « un petit problème de boisson ». J’ai failli mourir de soif, et ces ex-communistes appellent cela un « petit » problème ! Considérant les malaises que leur boisson mousseuse me procure, j’aurais dû les accuser d’empoissonnement. J’ai une excellente avocate à Munich, une baronne, très chic et élégante, avec une généalogie qui remonte à la nuit des temps, avec beaucoup de classe. Une snob avouée (elle adore lire mes écrits avant tout le monde et son fils –inscrit dans une école munichoise plus snob tu meurs – m’aide beaucoup dans mes études sur le snobisme des enfants), mais elle n’est pas une Schickimicki. C’est quelqu’un de sérieux. Il faut toujours avoir un avocat en Allemagne. Par ailleurs, quel était le livre le plus volé sur le stand de mon éditeur ?  Exactement ! Mon manuel pour les snobs allemands! Quelle belle mentalité ! Comme s’ils avaient honte de leur snobisme!

    Heureusement qu’il y a des Allemands à qui je ne fais pas peur. Dans quelques jours apparaît un nouveau cahier de Kosmopolis Interkulturelle Zeitschrift aus Berlin (un genre Autrement en format livre) sur le thème de l'incognito. Ma participation s’appelle « Eloge snob de l’anonymat ». Pour satisfaire mon petit besoin personnel de name-dropping (que je pratique rarement puisque, comme déjà avoué, je n’ai malheureusement pas la mémoire des noms), je suis toutefois très flatté de vous annoncer qu’Hertha Müller fait également partie des participants à ce numéro. Aux ignorants, je précise que c’est la Prix Nobel de littérature de 2009. Apparemment, vous n’êtes pas un(e) snob littéraire…

    Cette petite introduction me semblait nécessaire, car elle vous prouve que je ne suis pas rancunier. Or, il y a quelques mois, j’ai proposé à une maison d’édition basée à Cologne un manuscrit intitulé « Stilbrevier für Schlampen », un guide de conduite pour pétasses. Il y a bien un guide pour ces snobs qui désirent s’aventurier dans les pôles et la Sibérie, alors pourquoi les pétasses n’auront-elles pas le droit à avoir leur petit bréviaire? L’éditrice en semblait enchantée, alors je me suis mis au travail. Le verdict ? Hélas ! La publication de l’oeuvre nous paraît indécente par les temps qui courent ! Comme si les pétasses se soucient de la crise ! Faut-il encore qu’elles en soient informées ! Bref. Après le mal que je m’étais donné à mettre sur papier les meilleurs et plus précieux conseils dans un allemand charmant, vous pouvez imaginer ma déception! D’où mon ostracisme. Il est vrai que Greenpeace et moi avons des relations difficiles à cause de la publication d’un livre de cuisine (snob) aux Pays-Bas, dans lequel je divulguais des recettes du style pavé d’ours et carpaccio de baleine. Mais moi aussi je sais être politiquement actif : j’ai boycotté Dries van Noten pendant deux ans lorsque j’ai découvert qu’il fabriquait mes pantalons dans un lieu obscur en Bulgarie et non dans un béguinage pittoresque de la banlieue d’Anvers! 

    Singulièrement vôtre,

    anton@snoblissime.com


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    Voici édito numéro 2. Je vous entends soupire : Déjà ? Je n’ai pas encore eu le temps de lire tout ce qui était publié entre-temps. Ne craignez rien : après une période laborieuse, je vais maintenant prendre un rythme de croisière. De luxe, évidemment ! J’ai reçu une quantité de résonances stimulantes.  Rassurez-vous : ce blog n’aura, sans doute, jamais autant de lecteurs ou lectrices comme les sites des maisons du style Condé-Nast. Sa confidentialité, qui lui procure tant de snob-appeal, est pour l’instant bien gardée.

    C’est le snobisme de la « petite » adresse. Personnellement, je l’adore. Et les « petites » adresses qui font de la livraison à domicile, je les adore encore plus ! L’odeur des canards ou des vaches, il faut aimer ça. Je ne suis pas un bio-snob à ce point-là. Cependant, je ne suis pas un ennemi de la campagne : j’ai même possédé une maison en Ardèche. Mais lorsqu’un chenil (illégal) s’est installé sous ma terrasse, dont le propriétaire appartenait à la plus grande famille du village (c’est-à-dire  environ 75% des habitants), j’ai cru nécessaire de vendre ma part de cette ancienne seigneurie. De toute façon, l’Ardèche est comblée de Néerlandais. En étant un moi-même, cela revient à habiter en plein milieu d’un polder, sans les nausées à cause des virages et des crottes de chèvre !

    Revenons à nos moutons. Alors, vous avez donc bien compris : dès qu’une petite adresse se répand trop, elle perd subséquemment une partie de son snob-appeal, disons sa partie la plus intime. Le moindre petit excès de popularité et de démocratie peut lui être néfaste. Certes, selon plusieurs sites américains, Barack Obama serait un snob. J’ai déjà testé le potentiel snob d’une Miss Belge flamande (qui était lamentable) il y a quelques années, mais jamais d’un président américain, alors permettez-moi de rester neutre à ce sujet.

    Mon cher collègue, le Duc de Bedford (auteur du « The Duke of Bedford’s Book of Snobs »), prétend aussi (je l’ai déjà cité dans mon étude sur les lesbiennes et homosexuels snobs et ce ne sera pas la dernière fois car il a fait des constatations remarquables) que les gens adorent lire des livres sur les snobs parce qu’ils aiment lire des livres sur eux-mêmes. Cela ne présage rien de bien ! Profitons donc pleinement de ce petit moment d’intimité qui nous reste….

    Singulièrement vôtre,

    Anton@snoblissime.com

     


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    Après cette introduction (accueil) un peu intello, je voulais quand même vous dire que je suis charmé de vous accueillir sur mon site ! Enfin, vous n’aurez plus à me chercher vainement chez les bouquinistes ! Il était grand temps ! Désormais je serais constamment à votre service : un simple clic et mon petit univers s’ouvrira à vous ! Je sais, les kiosques débordent de lectures et d’incitations au snobisme. Souvent, pour leurs éditrices et éditeurs, le snobisme se synthétise tristement à l’achat du même parfum que la fille de Coppola, les mêmes ballerines que Madame Sarkozy, la même montre que son mari, et autres banalités du même genre ! Comme si le snobisme était aussi simple que d’avoir une bonne mémoire! Certes : le name-dropping est une chose essentielle à la notoriété des snobs en herbe. Je n’ai rien contre ces gens qui citent de noms célèbres à qui veut l’entendre : certains me transportent dans le monde agréable du sommeil. Mais, comme déjà signalé, pratiquer le name-dropping soi-même ne laisse que peu de place à la distractivité, mon passe-temps favori.

    J’ai habité quelques années à Munich où je m’étais pris d’affection pour un camarade adorable nommé Hérode. Je suis entièrement d’accord avec vous : ce n’est pas un nom facile à porter pour un chien allemand, surtout un pedigree dont les grands-parents étaient des champions luxembourgeois. Je l’ai donc changé en Harry, à l’instar de l’assistant de Derrick. Son professeur de chasse, un Bavarois du cru, me donna chaque semaine des exercices pour la maison. On ne peut pas prétendre que nous étions débordés par la vie mondaine munichoise, pourtant, nous ne trouvions jamais du temps pour faire nos devoirs. Alors, chaque samedi, nous avions droit aux reproches et réprimandes du chasseur bavarois. Je me souviens particulièrement d’un sermon qui se terminait avec : « Il y a des chiens qui vont à l’école et d’autres qui vont à la discothèque. »  Il va de soi, qu’Harry n’obtint jamais son brevet. J’ai fait une tentative de lui en acheter un, mais les Allemands sont si peu corruptibles. Je tiens toutefois à signaler qu’il fut le seul chien qui a eu droit à une visite complète et privée du Musée de la Chasse de la capitale bavaroise, qu’il a passé des vacances en Sardaigne, au Sacher à Vienne et bien d’autres lieux huppés et qu’il a dévoré au moins trois laisses Hermès et plusieurs tapis persans.

    Vous m’avez compris ! Il y a des échelles dans le snobisme, comme il y a des rayons dans votre kiosque préféré.  Je tâcherai de vous apporter un snobisme équilibré.  Parfois même très écolo ! 

    Singulièrement vôtre,

    Anton@snoblissime.com

     

     

     





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